lundi 13 octobre 2014

Argento

"L’argent est finalement, selon l’expression de Reiss-Schimmel, une « merveilleuse invention » : en s’interposant dans l’échange , il permet la reconnaissance de l’altérité et de l’égalité des protagonistes et favorise le sens de la relativité mais il n’est qu’un instrument sémantique neutre et ne peut jouer son rôle de relativisation que lorsque le Moi est stable. Quand celui ci ne l’est pas, alors l’usage de l’argent peut être pathologique : équivalent symbolique de l’excrément chez les uns, fantasme de toute puissance et de domination chez d’autres, il peut faire également l’objet d’un refus qui correspondrait à un rejet de son pouvoir de relativisation et de la perte du sentiment d’absolu qui en résulte.
L’auteur émet pour finir l’hypothèse que la Modernité a pu devenir le véhicule d’un déficit identitaire chez beaucoup d’individus et l’argent a pu prendre des formes pathologiques ; le livre ayant paru une première fois en 1993, on ne peut s’empêcher de penser à l’essor « de l’argent roi » des années 80 dont nous voyons une partie des conséquences aujourd’hui. Relu en 2009, on songe aux possibles remises en cause de la place de l’argent qui, lorsqu’elles sont excessives, témoignent également d’un possible dysfonctionnement social ... Enfin, le travail d’Ilana Reiss-Schimell  pousse à faire un « grand écart » entre les données macro (sociologiques et économiques) et la « psychologies des profondeurs » qu’il suppose. L’auteure en est d’ailleurs bien consciente puisqu’elle indique qu’il ne saurait être question d’établir des liens mécaniques entre les transformations psychiques et les données sociologiques mais qu’il ne faut pas pour autant exclure des liens indirects ou des possibles homologies".  Ilana Reiss-Schimmel (1993), La psychanalyse et l'argent, Ed. Odile Jacob. and Santa Maria del Trastevere.

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